L’ambassade de France s’associe à des studios sénégalais pour établir un nouveau centre de jeux à Dakar, dans l’espoir de stimuler l’industrie et d’attirer les investissements.
Au début du mois, lors de la conférence Vivatech à Paris, l’ambassade de France au Sénégal a annoncé qu’elle accorderait une subvention de 300 000 euros pour la construction d’un nouveau centre de jeux au cœur de Dakar.
Cet investissement est le fruit d’un partenariat entre l’ambassade et deux producteurs de jeux vidéo axés sur l’Afrique, à savoir Masseka et Kayfo Studio. Ces producteurs aideront à recruter des talents locaux et à mettre en place un modèle économique durable pour le projet.
« Le succès de cette initiative démontrera aux acteurs privés et publics le grand potentiel du marché des jeux et, espérons-le, attirera davantage d’investissements. »
« Peut-être que cela débouchera sur une coentreprise entre Masseka et Kayfo. Pour l’instant, nous nous concentrons sur ce qui fera le succès du projet et assurera la continuité lorsque le financement prendra fin », explique Teddy Kossoko, le président de Masseka, à African Business.
Pour assurer la longévité du projet, Teddy Kossoko indique que son partenaire et lui se concentreront sur le recrutement des meilleurs jeunes et sur leur formation à la production de contenu local et international.
Le jeu vidéo pèse plus de 300 milliards de dollars. L’Afrique aujourd’hui ne pèse que 1% de cette somme. L’objectif des partenaires est de créer des champions africains pour atteindre le seuil 2% d’un marché en progression dans les années à venir soit environ 9 milliards $.
Les jeux seront ensuite disponibles sur la plateforme de Masseka, Gara, qui est similaire à Apple Store et Google Play, et seront vendus sur les marchés africain, européen et américain.
Afin de diversifier les revenus, Teddy Kossoko indique que le centre créera également un département chargé de gérer les projets de sous-traitance pour les entreprises européennes. « Nous ferons tout ce qu’il faut pour générer des revenus », ajoute-t-il.
« Si nous réussissons, cela aura un impact énorme sur le secteur en ouvrant des portes. Si nous échouons, les choses seront encore plus compliquées qu’elles ne le sont déjà. Il y a donc une certaine pression. »
Selon Teddy Kossoko, le principal objectif du centre est de stimuler l’industrie au Sénégal. « En Afrique de l’Ouest, il y a beaucoup de pays dynamiques. Pour les seuls pays francophones, nous avons la Côte d’Ivoire et le Sénégal », explique-t-il.
Démontrer le potentiel du marché
En avril 2023, le Comité national de promotion de l’eSport au Sénégal (CONAPES) et Sénégal Numérique (SENUM SA) ont décidé de s’associer pour développer l’eSport dans le pays.
Selon le rapport Africa Developer Ecosystem 2021 de Google, le Sénégal comptait environ 10 000 développeurs en 2021. Le « paysage des développeurs » du pays est qualifié d’« émergent », se situant devant des économies plus importantes telles que l’Ouganda ou l’Éthiopie, qui sont considérées comme « naissantes ».
« Le Sénégal forme de très bons ingénieurs et la population a un bon pouvoir d’achat. Les revenus non officiels des jeux sont très convaincants », explique Teddy Kossoko. « Nous allons faire du bon travail là-bas. »
Dans un rapport publié en 2022, l’agence de recherche Newzoo, spécialisée dans les jeux vidéo, a recensé environ 511 millions de joueurs dans la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) en 2022, pour un marché évalué à plus de 6,8 milliards de dollars.
Le rapport note que dans les régions dynamiques comme l’Amérique latine, le Moyen-Orient et l’Afrique, « les facteurs de croissance des joueurs comprennent une meilleure infrastructure d’internet mobile, un accès abordable à l’internet mobile et une classe moyenne en pleine croissance ».
Malgré ces progrès encourageants, Teddy Kossoko reste réaliste quant au travail qui l’attend.
« Nous trouvons des milliers de développeurs dans la région, mais ce sont souvent des amateurs. Le secteur peine à se professionnaliser, avec seulement une douzaine de studios professionnels », reconnaît-il.
Les activités du centre de Dakar débuteront en septembre, et Teddy Kossoko attend des résultats pour janvier 2024. « Le succès de cette initiative démontrera aux acteurs privés et publics le grand potentiel du marché des jeux et, espérons-le, attirera davantage d’investissements. »
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