COMPÉTITIVITÉ DURABLE ET CROISSANCE INCLUSIVE AU SÉNÉGAL Le Rapport National sur la Compétitivité du Sénégal (RNCS 2024) appelle à des réformes systémiques

 

Le Sénégal affiche une croissance résiliente, mais le Rapport National sur la Compétitivité 2024 révèle des fragilités structurelles : endettement croissant, secteur informel dominant, et un capital humain à renforcer. Présenté lors d’un atelier de partage ce 4 décembre 2025 par Abdoulaye Faye, ce diagnostic lucide exhorte le Gouvernement et le Secteur privé à une action résolue pour transformer structurellement l’économie et concrétiser l’ambition de souveraineté nationale.

Le diagnostic établi par le Rapport National sur la Compétitivité du Sénégal (RNCS 2024), en enrichissant l’approche nationale du Centre d’Études de Politiques pour le Développement (CEPOD) avec les méthodologies internationales (FEM, ONUDI), adopte un cadre de compétitivité durable qui intègre les dimensions économiques, sociales et environnementales. L’économie sénégalaise a fait preuve de résilience, affichant un taux de croissance moyen annuel de 5,3 % entre 2015 et 2023, avec l’un des rares taux positifs au niveau mondial en 2020 (1,3 %). Côté entreprises, le secteur formel (seulement 3 % du tissu économique) a vu son chiffre d’affaires augmenter de 78,8 % entre 2016 et 2022.

 

Un Bilan Contrasté : Entre Résilience Macroéconomique et Défis Structurels

Cependant, des signaux d’alerte majeurs persistent : Endettement : Le ratio dette/PIB a atteint près de 119 %, bien au-delà du seuil de vigilance communautaire. Faible Richesse par Habitant : Le PIB par habitant n’a progressé que modestement (de 1 282 USD en 2016 à 1 476 USD en 2023). Compétitivité Industrielle : L’indice de l’ONUDI place le Sénégal au 102ᵉ rang sur 150, reflétant une stagnation de l’industrialisation.

 

Capital Humain et Social : Un Point de Vigilance Crucial

Sur le plan social, si des progrès sont notés dans la réduction du taux de pauvreté (légère baisse de 37,8 % à 37,5 % entre 2019 et 2022) et des inégalités de revenu, les classements internationaux soulignent les faiblesses du Capital Humain. Le Sénégal se classe au 138ᵉ rang sur 173 selon l’indice de la Banque Mondiale, pénalisé par un faible taux d’alphabétisation (57,7 % en 2022) et une qualité de l’éducation et de la formation professionnelle jugée insuffisante. L’emploi est également un défi, avec un taux de chômage s’élevant à 23,6 % en 2021. Le pays conserve une position favorable en matière de gouvernance (11ᵉ rang selon l’indice Mo Ibrahim en 2023), constituant un atout précieux. De plus, les investissements dans la R&D (0,58 % du PIB) et la digitalisation positionnent le Sénégal en tête parmi les pays africains (93ᵉ au Global Innovation Index). Néanmoins, l’environnement des affaires reste miné par : Un risque pays classé important. Des défis persistants sur les coûts et délais des procédures d’affaires et l’efficacité de la justice commerciale. Une forte concentration économique : Dakar, Thiès et Diourbel totalisent près de 60 % des entreprises.

 

La SNDSPI : La Feuille de Route de la Transformation

Le Rapport National sur la Compétitivité n’est pas qu’un simple constat. Il est le socle de la Stratégie Nationale de Développement du Secteur Privé et de Promotion de l’Investissement (SNDSPI), qui apporte les solutions aux défis identifiés. La SNDSPI s’articule autour de trois axes fondamentaux : le Développement des Pôles Territoriaux : Structuration des chaînes de valeur locales, développement des agropoles et des Zones Économiques Spéciales (ZES) ;l’Accélération de l’Entrepreneuriat et de l’Investissement Privé : Facilitation de l’accès au financement pour les PME et promotion de l’innovation ; et l’Amélioration du Climat des Affaires : Poursuite des réformes pour la simplification administrative, la modernisation fiscale et l’instauration d’une justice commerciale efficace.

 Appel à l’Action : Les Priorités pour Bâtir une Économie Souveraine

Mouhamadou Bamba Diop, Secrétaire général du ministère de l’Économie, du Plan et de la Coopération, a lancé un appel ferme à l’ensemble des acteurs – Gouvernement, secteur privé, société civile, partenaires au développement – pour une veille stratégique permanente et une action coordonnée pour une transformation systémique. Les actions prioritaires à court terme, alignées sur la SNDSPI, incluent : la simplification administrative via la digitalisation accélérée et l’instauration de guichets uniques territoriaux, le renforcement de l’accès au financement des PME (révision des critères, promotion du crédit-bail), la structuration des chaînes de valeur (cartographie des filières prioritaires) et le développement du label « Made in Senegal », la modernisation logistique et énergétique, ainsi que la création de parcs industriels sectoriels et le renforcement des capacités du capital humain et l’appui à la formalisation des entreprises face à la prédominance du secteur informel. « Il ne s’agit plus d’adopter des réformes isolées, mais de repenser en profondeur notre modèle de développement, pour bâtir une économie compétitive, diversifiée et résiliente, au cœur de laquelle se trouve notre ambition de souveraineté : alimentaire, économique, pharmaceutique et technologique. »

 La Compétitivité comme Impératif National

Le RNCS 2024 réaffirme que dans l’ère de la mondialisation, la compétitivité est un impératif stratégique sans lequel aucune nation ne peut créer durablement de la richesse et réduire la pauvreté. Le rapport est une feuille de route pour faire du Sénégal une économie plus compétitive, résiliente et souveraine, garantissant un avenir prospère et durable pour tous les Sénégalais. Le succès de cette transformation reposera sur l’efficacité de la mise en œuvre de la SNDSPI et la force du partenariat public-privé.

Mamadou SY

 

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