La Banque africaine de l’énergie avance à grands pas

Destinée à pallier le manque de capitaux extra-africains en direction des énergies fossiles, la BAE, qui a récolté 45% des capitaux nécessaires à sa création, ouvrira bientôt à Abuja.

 

Les pays africains producteurs de pétrole ont obtenu 45 % des 5 milliards de dollars nécessaires à la création de la Banque africaine de l’énergie (BAE), destinée à financer des projets pétroliers sur l’ensemble du continent en réponse au manque de fonds provenant des marchés internationaux.

Le Nigeria, l’Angola et le Ghana font partie des premiers bailleurs de fonds de la Banque africaine de l’énergie, selon Omar Farouk Ibrahim, secrétaire général de l’Organisation des producteurs de pétrole africains (APPO).

Les 18 pays membres de l’APPO sont l’Algérie, l’Angola, le Bénin, le Cameroun, le Tchad, le Congo, la RD Congo, la Côte d’Ivoire, l’Égypte, le Ghana, la Guinée équatoriale, le Gabon, la Libye, la Namibie, le Niger, le Nigeria, le Sénégal et l’Afrique du Sud.

« Nous sommes probablement la première banque de développement à passer du concept à la quasi-réalisation en un peu plus de deux ans », s’est félicité Omar Farouk Ibrahim lors d’une conférence sur le pétrole et le gaz en Angola, rapporte l’agence Bloomberg.

Omar Farouk Ibrahim
Omar Farouk Ibrahim

En effet, ce n’est qu’en 2022 que l’APPO et Afreximbank avaient signé les accords initiaux pour créer la Banque africaine de l’énergie. Cette banque est conçue comme une institution panafricaine indépendante et supranationale de développement énergétique. L’Angola, le Nigeria et le Ghana figurent parmi les premiers bailleurs de fonds, les fonds ayant été levés « avant même » la création légale de la banque.

En juin 2024, Afreximbank et APPO avaient finalisé l’accord de création et la charte de la Banque africaine de l’énergie lors d’une cérémonie qui s’est tenue en Égypte, après deux ans de négociations et de préparatifs.

Selon l’APPO, les producteurs ont créé l’AEB pour faire face à la crise de financement qui menace le secteur pétrolier et gazier du continent, en raison de l’évolution mondiale vers des énergies plus propres. Alors que les efforts mondiaux se concentrent sur l’objectif d’émissions nettes nulles de gaz à effet de serre, les pays africains comme l’Angola et la RD Congo pourraient avoir des difficultés à obtenir des financements pour des projets pétroliers sur les marchés internationaux des capitaux.

Du côté d’Afreximbank, on explique que « les financiers traditionnels, dont l’Afrique a dépendu pendant des décennies, retirent leur soutien, en particulier en Afrique, en citant les préoccupations liées au changement climatique comme raison principale ». Avis partagé par le secrétaire général de l’APPO, selon qui « le secteur pétrolier et gazier de l’Afrique dépendait trop lourdement des financements extérieurs depuis bien trop longtemps ».

Croissance contre environnement ?

Et de poursuivre : « Nous considérions les investissements étrangers comme allant de soi dans nos projets pétroliers et gaziers, mais la transition énergétique nous a montré que ceux sur lesquels nous avons compté pendant plusieurs décennies nous tournent désormais le dos ».

Omar Farouk Ibrahim considère que l’Afrique ne peut plus se permettre de s’éloigner rapidement des combustibles fossiles, d’autant plus qu’elle compte la plus grande population au monde n’ayant pas accès à l’énergie. Le Nigeria installera probablement le siège de cette institution à Abuja.

Cette création ne manquera de susciter le débat, en Afrique. En effet, la résolution des pays producteurs de pétrole du continent de continuer à soutenir la banque de l’énergie, qui espère développer davantage de champs pétrolifères dans la région, est en contradiction avec les résolutions adoptées lors du dernier sommet africain sur le climat, au Kenya, qui appellent à taxer davantage les émetteurs de carbone. Pour autant, l’Africa Finance Corp., notamment, a bien l’intention de continuer à investir dans les combustibles fossiles, malgré les avertissements sur le changement climatique lancés par les principales institutions de développement. Ce, en raison des besoins importants du continent en matière de développement, explique à Reuters, Sanjeev Gupta, directeur exécutif des services financiers de l’AFC.

Une opinion notamment partagée par les dirigeants du Nigeria, le président Bola Tinubu plaidant en faveur d’un partenariat équilibré pour relever le défi climatique. Afreximbank calcule que le désinvestissement dans les énergies fossiles pourrait coûter jusqu’à 30 milliards $ de PIB au Nigeria. Et que plus généralement, si une réduction des combustibles fossiles peut diminuer les émissions du continent, la plupart des pays africains dépendent des combustibles fossiles pour répondre à leurs besoins énergétiques immédiats. Il souligne également que les combustibles fossiles jouent un rôle crucial en tant que source majeure d’exportations, de devises, de création d’emplois et de production et de fourniture d’électricité.

D’ailleurs, l’APPO s’est récemment associée au Central African Business Forum pour promouvoir l’un des projets les plus ambitieux du continent, l’oléoduc de pétrole brut d’Afrique de l’Est (EACOP), qui, une fois achevé, contribuerait à revitaliser onze pays africains, d’après l’organisation.

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