Les économistes du FMI ajustent en légère hausse leurs prévisions de croissance pour 2025 en Afrique subsaharienne, malgré une année 2024 moins porteuse et des risques inflationnistes.
Le FMI (Fonds monétaire international) maintient ses précédentes prévisions de croissance de l’économie mondiale en 2024 (3,2%) et 2025 (3,3%). Néanmoins, l’institution note que les principales économies vont converger vers ces taux de croissance ; les pays en retard font preuve d’une – relative – résilience tandis que les pays censés être les plus dynamiques le sont moins que prévu.
La hausse des prix dans les services ralentit le rythme attendu de désinflation, ce qui complique le retour à la normale de la politique monétaire, pointe le FMI qui redoute une nouvelle accélération de l’inflation et son corollaire, des taux d’intérêt élevés.
Au-delà des enjeux à court terme, concluent les économistes, les dirigeants doivent agir « dès maintenant » pour redynamiser des perspectives de croissance à moyen terme en perte de vitesse.
En revanche, l’activité et le commerce au niveau mondial se sont raffermis au début de l’année ; les échanges ont été stimulés par de fortes exportations en provenance d’Asie, en particulier dans le secteur des technologies. Ce qui explique une croissance plus élevée que prévu au premier trimestre, dans certains pays leaders, à l’exception du Japon.
A contrario, les prémices d’une reprise économique se sont concrétisées en Europe, grâce à une amélioration de l’activité dans le secteur des services. Un atout pour les pays africains qui commercent avec le Vieux continent. Le FMI prévoit une hausse des cours des produits de base, y compris hors pétrole, supérieure aux premières estimations. Si les taux d’intérêt devraient diminuer au second semestre, se sera en ordre dispersé.
Dans l’ensemble, le FMI revoit à la hausse ses prévisions de croissance des pays émergents et des pays en développement ; l’augmentation prévue est tirée par une activité plus forte en Asie, en particulier en Chine et en Inde.
Les prévisions de croissance pour l’Afrique subsaharienne sont revues à la baisse, principalement du fait d’un abaissement des perspectives de croissance au Nigeria, compte tenu de l’activité plus faible qu’attendu au premier trimestre 2024. De plus, les prévisions de croissance au Soudan sont revues nettement à la baisse, car la persistance du conflit pèse plus lourdement sur l’économie.
Une période prolongée de tensions inflationnistes
Le FMI prévoit désormais une croissance de 3,7% en Afrique subsaharienne cette année, et de 4,1% en 2025, soit un ajustement de respectivement -0,1 point et +0,1 point. La croissance serait de 3,1% (-0,2 point) en 2024 et de 3,0% (inchangé) au Nigeria et de 0,9% et 1,2% en Afrique du Sud, des prévisions inchangées.
Un motif d’optimisme, donc, la croissance du commerce mondial devrait remonter à environ 3,25 % par an en 2024-2025, après une quasi-stagnation en 2023, et s’inscrire donc à nouveau en phase avec la croissance du PIB mondial.
Toutefois, l’économie mondiale n’« est pas à l’abri ». Certains risques à court terme ont gagné du terrain. Il s’agit notamment de risques d’accélération de l’inflation liés à une désinflation insuffisante dans le secteur des services et de pressions sur les prix émanant d’un regain des tensions commerciales ou géopolitiques. Les risques d’inflation persistante dans le secteur des services sont liés à la fixation à la fois des salaires et des prix.
Le risque d’une forte inflation accroît les perspectives de taux d’intérêt plus élevés pour une période plus longue que prévu, « ce qui aggrave les risques extérieurs, budgétaires et financiers ». Une appréciation prolongée du dollar due aux disparités de taux pourrait perturber les flux de capitaux et entraver l’assouplissement prévu des politiques monétaires, ce qui pourrait avoir une incidence négative sur la croissance. Le FMI redoute également que le climat électoral, dans de nombreux pays, entraîne un certain protectionnisme, voire un repli sur soi, s’accompagnant d’excès budgétaires préjudiciables à la dette.
Une fois ces risques posés, le FMI recommande : « Alors que les écarts de production commencent à se résorber et que l’inflation recule, les dirigeants doivent s’atteler à deux tâches : persévérer dans le rétablissement de la stabilité des prix et s’attaquer aux séquelles des récentes crises, notamment en reconstituant les réserves perdues et en relançant durablement la croissance. » En d’autres termes, prévenir l’inflation et ne pas assouplir trop vite la politique monétaire.
Et le FMI de s’inquiéter – c’est son rôle –, de possibles dérapages budgétaires. Dans les pays émergents et les pays en développement, les récentes divergences dans les mesures adoptées mettent en évidence la nécessité de gérer les risques de volatilité des devises et des flux de capitaux. « Les réserves de change doivent être utilisées avec prudence et préservées pour faire face à des sorties de capitaux potentiellement plus élevées à l’avenir. »
L’enjeu des migrations
Au-delà des enjeux à court terme, concluent les économistes, les dirigeants doivent agir « dès maintenant » pour redynamiser des perspectives de croissance à moyen terme en perte de vitesse. Une action résolue des pouvoirs publics est nécessaire pour renforcer le dynamisme des entreprises, réduire la mauvaise allocation des ressources et remédier ainsi aux carences constatées. Et l’institution d’encourager les pays occidentaux ou plus avancés à continuer de stimuler l’offre de main-d’œuvre, notamment en intégrant mieux les femmes et les immigrés.
« Certes, l’émigration des jeunes et des personnes instruites peut entraîner des conséquences néfastes pour les pays d’origine, mais il est possible d’en atténuer le coût. Les mesures qui contribuent à tirer parti des réseaux de la diaspora, à maximiser les avantages des envois de fonds et à élargir les possibilités offertes par le marché du travail intérieur sont des pistes possibles. »
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