Le président sénégalais Faye s’entoure d’économistes prudents

D’anciens fonctionnaires du fisc et du FMI occupent des postes clés au sein du gouvernement du Sénégal. Le nouveau président s’éloigne ainsi du radicalisme de sa campagne électorale.

Le nouveau président du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, a nommé des personnalités orthodoxes à des postes économiques clés après une campagne électorale qui promettait de donner au pays une orientation radicalement nouvelle.

Cheikh Diba, ancien fonctionnaire des impôts, occupera le poste de ministre des Finances, tandis qu’Abdourahamane Sarr, qui a été économiste principal au FMI (Fonds monétaire international) en tant qu’expert en politique monétaire, sera le nouveau ministre de l’Économie.

Ces nominations sont de nature à rassurer les investisseurs internationaux sur le fait que le Sénégal, qui était largement considéré comme une plaque tournante favorable aux affaires sous la présidence de Macky Sall, restera une destination sûre pour les investissements.

Bassirou Diomaye Faye a demandé à son Premier ministre, Ousmane Sonko, un vaste audit des finances publiques et de l’état de l’économie du pays, prélude à un plan d’action du gouvernement.

Pendant la campagne électorale, Bassirou Diomaye Faye a déclaré qu’il renégocierait les contrats pétroliers et gaziers du Sénégal avec les entreprises internationales et qu’il encouragerait les entreprises nationales, afin de donner au pays un plus grand contrôle sur ses propres ressources et d’éviter ce que son parti, le Pastef, a appelé l’« esclavage économique ».

Il a également déclaré dans un premier temps que le Sénégal devrait adopter une nouvelle monnaie, avant de faire légèrement marche arrière et de soutenir que Dakar devrait plutôt réformer le franc CFA existant au sein du bloc de la CEDEAO.

À l’époque, de nombreux analystes politiques n’étaient pas convaincus que la rhétorique du candidat Faye lors de la campagne électorale deviendrait une politique officielle lorsqu’il serait au pouvoir. Alex Vines, directeur du programme Afrique du groupe de réflexion Chatham House à Londres, expliquait à African Business que le Président Faye « est beaucoup plus pragmatique vis-à-vis du secteur privé et il doit attirer davantage d’investissements ».

Néanmoins, la rhétorique de Bassirou Diomaye Faye, combinée à l’incertitude quant à la mise en œuvre de ces plans par le nouveau gouvernement, conduit l’agence de notation S&P à signifier que « le nouveau gouvernement doit encore communiquer un grand nombre de ses propositions clés en matière de politique fiscale et économique, ce qui pourrait affecter la solvabilité du Sénégal ».

Audit de l’économie et des finances public

De son côté, Signal Risk, une société de gestion des risques basée au Cap, affirme que « le paysage politique s’est stabilisé à la suite de l’élection présidentielle du 24 mars » et que les premières nominations du gouvernement suggèrent que l’« élaboration des politiques sera probablement plus modérée que sa rhétorique pourrait le suggérer ».

Ils ajoutent : « Bien que M. Faye ait fait campagne sur un programme quelque peu radical, il est peu probable que sa politique en tant que président soit aussi peu orthodoxe que sa rhétorique pré-électorale. » Si Bassirou Diomaye Faye a cherché à capitaliser sur la désaffection à l’égard de l’administration Sall, il est peu probable qu’il soit prêt à s’aliéner des partenaires économiques clés, tels que les majors pétrolières et le FMI. En effet, ces accords sont essentiels à la solvabilité du pays, à la stabilité économique et à la réalisation des aspirations de Bassirou Diomaye Faye en matière de développement.

Les marchés ont réagi positivement au résultat des élections sénégalaises et à ses conséquences. Les rendements des obligations internationales du Sénégal, d’une valeur de 4 milliards de dollars, ont baissé, ce qui témoigne d’une plus grande confiance des investisseurs dans l’économie du pays. Fitch Ratings a également déclaré que « le retour à la stabilité politique et sociale remet le Sénégal sur la bonne voie pour atteindre les prévisions du FMI, à savoir une croissance du PIB de 8,3 % en 2024 ».

En Conseil des ministres, Bassirou Diomaye Faye a demandé à son Premier ministre, Ousmane Sonko, un vaste audit des finances publiques et de l’état de l’économie du pays, prélude à un plan d’action du gouvernement. La société civile y voit le signe d’une bonne gouvernance et d’une future réduction du train de vie de l’État. Charge aussi au gouvernement de dresser l’état des lieux de la coopération internationale et des partenariats public-privé.

Le chef de l’Etat souhaite, dès la fin du mois d’avril, « finaliser le plan d’action du gouvernement, avec un agenda précis de réalisation des objectifs fixés », et « engager, sans délai, avec le secteur privé, national notamment, la mise en œuvre d’une politique hardie de relance de l’économie nationale ».

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