L’Organisation des Nations-Unies avait recommandé aux pays développés, de consacrer 0,7 % de leur revenu national brut à l’aide publique au développement. Cette recommandation est restée lettre morte au niveau de certains pays comme la France. Seuls quelques pays de l’Europe du Nord notamment le Danemark, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas et la Suède ont suivi cette recommandation. Subitement, la France décide de s’aligner sur cette recommandation avant 2022.Explication !
Aujourd’hui, la situation est en train de changer. L’Afrique devenue très attractive a désormais un grand intérêt pour beaucoup d’autres puissances notamment celles émergentes. Ces dernières font tout et déploient tous les moyens nécessaires pour avoir une coopération fructueuse avec les pays africains. En tête de liste, il y a la Chine. Elle est rejoint depuis quelques années par la Turquie. La Russie, un revenant, pointe elle aussi le bout du nez. La France est ainsi bousculée sur le continent africain. Rien n’est plus acquis définitivement pour elle. Tout est remis en question par le choix de nombre de pays africains. C’est l’ère de la diversification des partenaires économiques. C’est sans doute la raison pour laquelle, Paris est en train de revoir sa stratégie en matière d’aide publique au développement. Il est indiqué dans un rapport que nous avons visité que l’aide publique au développement devrait atteindre 0,56% du revenu national brut en 2020, contre 0,47% initialement prévu, et 0,69% en 2021, c’est-à-dire presque les 0.7% recommandé par l’ONU, depuis des années. Désormais pour les autorités françaises, il ne s’agit plus de faire plus, mais de faire mieux. Pourquoi alors avoir attendu aussi longtemps pour faire plus et mieux ? N’est-il pas trop tard ? En tout cas, les lignes ont bougés.
La France n’est plus le maître absolu en Afrique. Lier l’obtention de son aide à la nature du régime politique en vigueur dans le pays aidé n’est plus possible. D’autres puissances aident ces pays sans regarder ce qu’ils font sur le plan politique. Naturellement les dirigeants africains accourent vers ces bienfaiteurs et justifient leur choix en affirmant comme Macky Sall « tout ce que nous faisons avec la Chine est parfaitement maitrisé ». Au-delà des dirigeants politiques, et c’est ce qui va rendre la tâche encore plus difficile aux dirigeants français, les opinions publiques africaines, par leurs attitudes ne semblent plus être convaincues de la nécessité de maintenir la France comme partenaire privilégié. Une partie de la société civile manifeste clairement son souhait de voir la France quitter le continent. Les actes qu’ils posent notamment concernant la monnaie fait bouger les choses. La France a reculé récemment sur la demande forte concernant la fin du Francs CFA, réclamée par beaucoup d’activistes. L’Assemblée nationale française a adopté, le jeudi 10 décembre 2020, le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord de coopération entre la France et les Etats membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Cet accord instaure comme nouveauté entre autres, la suppression de l’obligation de centralisation des réserves de change de la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) sur le compte d’opérations du Trésor français, Le retrait de la France des instances de gouvernance de la Zone , le changement de nom. Cela était inimaginable il y a quelques années.
Renversement de situations
Après avoir soutenu pendant plusieurs années les tyrans qui étaient à la tête des pays africains, la France s’est réveillée un bon jour pour dire stop, c’est fini ! L’aide accordée à vos pays est maintenant étroitement liée à l’instauration de la démocratie et de l’état de droit chez vous. Le vent de la démocratie qui a soufflé alors sur l’Afrique avec les conférences nationales, suivies d’élections lesquelles ont installé au pouvoir de nouveaux dirigeants, n’a pourtant pas fait évoluer la situation économique. Au contraire le continent est restée pauvre et plus dépendante de l’aide extérieure contrôlée par des pays comme la France.
Les nouveaux venus bouleversent les choix
La force de frappe de l’empire du milieu est plus que convaincante. La Chine qui projette d’investir sur le continent, pour les trois prochaines années, 60 milliards de dollars, n’est pas un concurrent facile. Si en plus, elle ne demande pas les garanties traditionnelles (bonne gouvernance, démocratie etc. .) C’est la ruée vers elle. Beaucoup de pays africains ont grandement amélioré leur situation sur le plan des infrastructures, avec l’appui de la Chine. Il en est de même pour une autre puissance émergente : la Turquie. Cette dernière, a donné ses preuves avec la construction d’infrastructures modernes dans des délais très limités. Au Sénégal, par exemple, ils ont construit le Centre de conférence Abdou Diouf, en onze mois. On ne parle que des autres infrastructures comme le Dakar Aréna. Ils ont finalisée la construction de l’aéroport Blaise Diagne. Ils sont devenus ainsi des concurrents sérieux pour la France et ses entreprises. Parce qu’en fin de compte, il ne s’agit là pour ces pays que d’ouvrir par la voie de la coopération et de l’aide, la porte à leurs entreprises.
Les chiffres parlent d’elle-même
Entre les 204 milliards d’échanges commerciaux que la Chine a réalisés en 2018 avec l’Afrique et les 51,3 milliards de dollars pour la France, il y a manifestement un grand écart. Ces chiffres montrent clairement que la compétition est devenue très rude pour une France qui se croyait imbattable sur son terrain de jeu favori : l’Afrique. Et au rythme où vont les choses, elle risque de se faire rattraper par les autres notamment la Russie avec ces 20 milliards de dollars (la grande partie est pour l’armement) et la Turquie qui connait une hausse fulgurante de ses échanges commerciaux avec l’Afrique. De 5 milliards de dollars au début des années 2000, le volume de ces échanges a dépassé les 16 milliards de dollars maintenant.