CAMPAGNE DE COMMERCIALISATION DE L’ARACHIDE Chou blanc pour les huiliers

Les échos qui nous parviennent du déroulement de la présente campagne de commercialisation de l’arachide ne sont pas guère favorables aux huiliers. En effet, ils n’arrivent pratiquement pas à engranger un tonnage conséquent d’arachides auprès des producteurs. Ces derniers préfèrent se tourner vers les marchés parallèles, là où les prix proposés dépassent les 250 FCFA le kilogramme fixé par l’Etat du Sénégal.

 

On est très loin de l’époque peu reluisante de la filière arachide du Sénégal, il y a de cela quelques années. La situation était très difficile pour des paysans qui ne parvenaient pas à vendre leur production d’arachides, fruit des mois de dur labeur. Les campagnes se suivaient et se ressemblaient avec des prix officiels au kilogramme qui étaient toujours en-dessous de leurs espérances et des charges. Ces prix étaient largement revus à la baisse dans les loumas (marchés hebdomadaires) où beaucoup de paysans  se rendaient, pour vendre quelques kilogrammes d’arachides, afin d’assurer leur survie, en attendant de connaître le sort qui sera réservé à leurs nombreux bons impayés. Les producteurs d’arachides ne savaient vraiment pas à quel saint se vouer. Devant les usines de la Sonacos, c’était des centaines de camions, en file indienne que l’on pouvait trouver sur place. Ils attendaient tous un déchargement illusoire. Dans leurs maisons où ils stockaient leurs productions, une bonne partie était perdue avec les attaques des insectes. C’était des scènes en même temps triste et désolante. Le gouvernement d’alors ne croyait plus à l’arachide. Il tentait de séparer les organisations de producteurs et diaboliser le CNCR. Mais aujourd’hui, la situation est tout autre avec l’arrivée de nouveaux acheteurs, notamment les Chinois  sur le marché. Ils achètent au comptant et proposent un prix qui surclasse le prix officiel fixé par l’Etat.

Ouverture du marché aux étrangers : une aubaine pour les producteurs

Le prix proposé cette année aux producteurs, pour le kilogramme d’arachide est un bon prix. En effet, 250 FCFA le kilogramme, c’est du jamais vu dans la filière arachide au Sénégal. Le prix du kilogramme d’arachide est resté longtemps en-dessous des 200 FCFA. Malgré toutes les protestations, le CENIA (Comité National Interprofessionnel de l’arachide) ne voulait pas dépasser ce cap. Seulement aujourd’hui, les choses ont bien changé. La présence sur le marché d’acheteurs étrangers qui proposent un prix plus intéressant a changé la donne. Mieux, le gouvernement du Sénégal ne peut pas s’offrir le luxe d’interdire aux Chinois l’accès au marché de l’arachide, car la Chine reste un partenaire stratégique. Même les pays les plus développés veulent entretenir de bonnes relations commerciales avec l’Empire du milieu. Et c’est la loi du marché qui est en train de faire ses effets. Malgré que le prix proposé par les huiliers soit bon, celui proposé par les exportateurs est meilleur, entre 300 et 350 francs le kilogramme. C’est la raison pour laquelle, tous se ruent vers les exportateurs en laissant en rade les huiliers. Ce qui fait planait des menaces de fermetures sur les usines sénégalaises.

Une meilleure collaboration entre huiliers et producteurs

Le gouvernement ne peut pas exiger des producteurs d’arachides qu’ils vendent leur production en primeur aux huiliers et principalement à la SONACOS. D’autant plus que c’est la libre concurrence qui a court au Sénégal. C’est à l’industriel, lequel a perdu la main, de faire les démarches nécessaires pour ne plus être victime de la guerre des prix imposée par les exportateurs notamment les Chinois. Un des responsables du département de l’Agriculture a proposé l’établissement de conventions entre les huiliers et les producteurs. Ces contrats pourraient ainsi leur donner la primeur sur leurs productions, et permettre à ces derniers de ne plus faire face à de telle situation où leur appel à l’aide tombe dans les oreilles d’un sourd. L’industriel doit selon ce fonctionnaire, s’investir directement dans la production des graines d’arachides. Il doit nouer des partenariats avec des producteurs, leur fournir des graines de qualité et  des intrants, contribuer financièrement dans la production. Il pourra ainsi s’assurer, la production dont elle a besoin pour faire tourner ses machines. La disparition des intermédiaires est aussi un facteur bloquant dont il faudrait trouver des alternatives. C’est  seulement ainsi sans doute, que la survie des industriels pourra être assurée de même que la préservation des emplois, lesquels  sont aujourd’hui plus que menacés.

Aliou Kane Ndiaye