Tour d’horizon des faits marquants de l’actualité minière africaine en 2021

L’année 2020 a été placée sous le signe de la résilience pour le secteur minier africain qui devait faire face à la pandémie de Covid-19. En 2021, l’industrie a poursuivi sur cette voie et est allée bien au-delà, avec le développement de plusieurs projets capables d’approvisionner le monde en métaux essentiels pour son avenir. L’Agence Ecofin vous propose un tour d’horizon des faits marquants des douze derniers mois dans ce secteur vital pour les économies de plusieurs pays africains.

Une année historique pour le cuivre

Le métal rouge, surnommé Dr Copper, car il représente un bon indicateur de la santé économique mondiale, n’a pas démenti sa réputation en 2021. Dans le sillage de la reprise économique mondiale, soutenue par les campagnes de vaccination massives, le cuivre a en effet poursuivi sa tendance haussière débutée mi-2020 pour atteindre un record historique. En mai dernier, sur la London Metal Exchange (LME), il a battu son précédent record de 2011 (prix légèrement au-dessus de 10 000 $ la tonne) et s’est hissé à plus de 10 700 $.

Malgré une tendance à la baisse depuis lors, notons que le cuivre se négocie toujours au-dessus de 9 000 $ la tonne, aussi bien pour les prix au comptant que pour les contrats à terme. Cette situation doit beaucoup aux perspectives très optimistes pour certains secteurs appelés à consommer énormément de cuivre : véhicules électriques (VE), solaire, éolien ainsi que tous les autres domaines liés à l’économie bas carbone du futur. Plusieurs analystes s’accordent même pour prédire un déficit sur toute la décennie, ce qui devrait maintenir les prix hauts.

En RDC, la future deuxième plus grande mine de cuivre au monde entre en production

Si la hausse du cuivre en 2021 a été une bonne nouvelle pour les compagnies et pays producteurs, certains ont eu davantage de raisons de se réjouir. C’est le cas d’Ivanhoe Mines et Zijin Mining qui ont lancé en mai ce qui devrait devenir à terme la deuxième plus grande mine de cuivre au monde. Kamoa-Kakula, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, a produit 105 884 tonnes de concentré de cuivre, pendant ces quelques mois d’activité en 2021, et les deux partenaires du projet visent entre 290 et 340 000 tonnes pour 2022.

Avec cette entrée en production, la RDC conforte davantage sa place de leader en Afrique. Mieux, le pays devrait devenir le troisième producteur mondial du métal rouge, derrière les deux géants sud-américains, Chili et Pérou, selon les estimations de Fitch. En plus des redevances minières et taxes que l’Etat congolais devrait récupérer sur la durée de vie estimée actuellement à un peu moins d’un demi-siècle, notons que Kamoa-Kakula va participer à l’industrialisation du pays et à la politique de transformation locale des minéraux voulue par Kinshasa. Ivanhoe Mines et son partenaire ont en effet lancé, au dernier trimestre 2021, la construction de la plus grande fonderie de cuivre d’Afrique. Intégrée au complexe minier de Kamoa-Kakula, elle devrait produire annuellement 500 000 tonnes de cuivre blister.

Le boom des VE et son impact sur les métaux stratégiques

2021 a été aussi l’année où le boom des véhicules électriques est devenu un peu plus une réalité. Si la pénurie de certains composants électroniques nécessaires à leur fonctionnement en a limité la production, la demande est restée forte et, avec elle, le prix des métaux qui entrent dans leur fabrication. Sur le marché de référence qu’est la LME, le cuivre n’a donc pas été le seul à affoler les compteurs puisque le prix du cobalt a plus que doublé en un an pour clôturer à environ 70 000 $ la tonne, le 31 décembre 2021. En décembre seulement, l’hydroxyde de lithium a de son côté gagné 5%. Et les perspectives sont encore plus prometteuses pour les pays producteurs de ces différents métaux, car la demande pour les VE devrait continuer de croître, portée par les plans des gouvernants européens et américains visant à interdire les moteurs à combustion, d’ici 2035. Les plus grands constructeurs automobiles investissent d’ailleurs plus que jamais dans leur stratégie électrique, autrefois réduite à la portion congrue. L’allemand Volkswagen, par exemple, compte ainsi consacrer la moitié (et même plus) de ses nouvelles dépenses dans l’électrique, afin d’atteindre 50% de ventes de voitures électriques dès 2030 et jusqu’à 100% d’ici 2040 sur ses marchés principaux. Comme ses pairs Tesla et Toyota, la société au centre du dieselgate en 2015 va aussi investir dans les batteries électriques pour limiter sa dépendance vis-à-vis de l’approvisionnement chinois, avec la construction en Europe de plusieurs usines dédiées.

Plusieurs pays africains se positionnent

Ces divers développements font dire aux analystes du cabinet Fitch Solutions que les déficits sur le marché du lithium seront de plus en plus importants d’ici 2030, et ce, malgré l’apparition de nouveaux producteurs sur le marché. Si la participation des pays africains au boom des véhicules électriques est encore négligeable, des avancées décisives ont néanmoins été enregistrées cette année, particulièrement dans le secteur du lithium. Quatre projets ont ainsi retenu l’attention, dont deux en Afrique de l’Ouest.

Au Ghana, l’américain Piedmont Lithium, spécialisé dans la fourniture d’hydroxyde de lithium, s’est engagé à apporter le financement nécessaire à la construction de la mine Ewoyaa, dès qu’une étude de faisabilité positive sera disponible. Si le projet reste encore loin du début des travaux de construction, les données disponibles laissent espérer que le lithium pourrait devenir très vite l’un des principaux contributeurs aux recettes minières de l’ex-Gold Coast. Selon la dernière étude exploratoire publiée par son propriétaire Atlantic Lithium, Ewoyaa peut en effet générer plus de 3,4 milliards $ de revenus en 11 ans, pour un investissement initial estimé à seulement 70 millions $. La mine devrait livrer annuellement 300 000 tonnes de concentré de spodumène titrant 6 % d’oxyde de lithium.

Beaucoup plus avancé et encore plus important, Goulamina (Mali) est le second projet de lithium en Afrique de l’Ouest qui a bénéficié d’un accord de financement en 2021. Son propriétaire, l’australien Firefinch, est en effet tombé d’accord avec le chinois Ganfeng Lithium qui devrait mobiliser les fonds nécessaires à l’entrée en production de la mine. Elle peut livrer, d’après l’étude de faisabilité actualisée publiée en décembre dernier, 726 000 tonnes de concentré de spodumène par an, sur une durée de vie de 21 ans.

Dans les derniers jours de 2021, c’est un autre projet de lithium au Zimbabwe qui a – non pas bénéficié d’un financement – mais simplement changé de mains, passant de l’escarcelle de l’australien Prospect Resources, à celle du chinois Zhejiang Huayou Cobalt. Cette prise de contrôle d’Arcadia, la troisième participation d’entreprises chinoises à des projets africains de lithium en 2021, peut susciter des réactions sur la « colonisation » du sous-sol du continent par l’empire du Milieu. Elle représente néanmoins une bonne nouvelle relative pour le Zimbabwe, car la mobilisation du financement devrait se faire plus facilement avec le nouveau propriétaire qui cherche à construire un portefeuille de lithium pour augmenter sa production de métaux nécessaires aux véhicules électriques. Bonne nouvelle, parce que le pays d’Afrique australe, unique producteur africain de lithium jusque-là, tient là un moyen d’accroitre très prochainement ses recettes minières avec l’entrée en production de la mine, même si la transformation locale du lithium va demeurer un vœu pieu, pour le moment.

En RDC, notons aussi l’arrivée de Contemporary Amperex Technology (CATL), à travers sa filiale CATH, sur le projet Manono. L’accord annoncé le 27 septembre et en attente de finalisation donne au groupe chinois un intérêt de 24% dans le projet, en échange d’un investissement de 240 millions $ pour la construction de la mine de lithium. En tant que partenaire du projet, CATH devra aussi apporter sa quote-part du capital nécessaire aux travaux.

Les nouvelles ambitions de la RDC

Cette absence de transformation locale des minerais, associée régulièrement aux pays miniers africains, la RDC entend y mettre fin, au moins pour ce qui concerne les métaux nécessaires aux véhicules électriques. C’est l’ambition qui a guidé l’organisation fin novembre, à Kinshasa, du DRC-Africa Business Forum, un évènement regroupant experts et hauts dirigeants africains autour de la création d’une chaine de valeur africaine pour la production des matériaux essentiels aux batteries et véhicules électriques, à partir des richesses du sous-sol du continent.

 « Nous devons apporter de la valeur à nos produits, ce que nous n’avons pas fait pendant des siècles. Maintenant, nous devons casser l’image d’un simple continent producteur de matières premières », a résumé le président de la Zambie, Hakainde Hichilema, au cours de l’évènement.

Les autres faits marquants

Si l’or n’a pas retrouvé en 2021 les sommets atteints en 2020, il faut noter qu’il s’est néanmoins maintenu au-dessus de 1 700 $ l’once, durant quasiment toute l’année. En dehors des producteurs bien établis, le Nigeria est le nouvel acteur qui peut aussi tirer profit de cette situation avec l’entrée en production de la mine d’or Segilola, en octobre. Ce n’est d’ailleurs pas la seule bonne nouvelle pour le secteur minier (encore sous-développé) de ce pays, car la compagnie minière Kogi Iron a publié, en décembre dernier, une étude exploratoire prometteuse pour son projet de fer Agbaja (et son aciérie associée). Il faut aussi rappeler la promesse d’investissement de 2 milliards $, obtenue auprès des Emirats arabes unis, qui laisse espérer de grandes avancées au Nigeria en 2022.

2021 restera aussi l’année au cours de laquelle Endeavour, une compagnie active exclusivement dans l’exploitation aurifère en Afrique de l’Ouest, est entrée dans le top 10 des producteurs mondiaux d’or, grâce au rachat de Teranga Gold. Signalons pour finir l’obligation faite, depuis le 1er janvier 2021, aux 55 pays mettant en œuvre la norme ITIE dont une vingtaine en Afrique, de divulguer tous « les contrats, licences et accords nouveaux et modifiés conclus avec les entreprises extractives ». C’est un pas important dans la marche vers l’éradication de la corruption dans le secteur, complété en fin d’année par un engagement similaire pris par les compagnies membres du Conseil international des mines et des métaux (ICCM) qui représentent le tiers de l’industrie minière mondiale.

(Agence Ecofin)

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