Les emprunts doivent être abordables pour les pays africains

Face aux chocs mondiaux et à la nécessité urgente de lutter contre le changement climatique, il est impératif de restructurer l’architecture financière mondiale, nous confie la secrétaire exécutive adjointe de la Commission économique pour l’Afrique, Hanan Morsy.

Les défis financiers et climatiques croissants de l’Afrique, avec plusieurs pays confrontés au surendettement et aux vulnérabilités climatiques, sont une préoccupation majeure, déclare à African Business Hanan Morsy, secrétaire exécutive adjointe de la CEA (Commission économique des Nations unies pour l’Afrique).

Depuis 2022, la CEA coordonne le groupe de travail africain de haut niveau sur l’architecture financière mondiale, qui réunit les ministres des finances, de la planification et du développement économique, ainsi que l’Union africaine, la Banque africaine de développement, la Banque africaine d’import-export, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international.

« La série de chocs mondiaux a fait reculer le continent d’au moins deux décennies. Cela augmente l’ampleur du défi, mais ne le rend pas impossible. Les pays doivent agir, car le coût de l’inaction est élevé. »

Le groupe de travail sert de plateforme visant à dégager un consensus parmi les décideurs politiques africains sur les principales propositions de réforme de l’architecture financière mondiale afin de refléter l’évolution de la situation.

« Les pays africains dépensent entre 5% et 15 % de leur PIB par an pour faire face aux effets du climat. Cela affecte gravement la capacité de l’Afrique à s’attaquer à l’action climatique stratégique », estime Hanan Morsy.

Selon elle, les conséquences de la pandémie, de la guerre en Ukraine et des chocs climatiques ont eu un impact significatif sur les économies africaines, ce qui signifie que le continent devra améliorer l’efficacité de ses dépenses et donner la priorité aux investissements les plus rentables.

« Les ressources nécessaires pour atténuer l’impact de ces chocs et le coût du financement sont de plus en plus inabordables. L’amélioration des conditions de prêt auxquelles l’Afrique est confrontée, la réduction du coût du financement et l’allongement des échéances sont quelques-unes des mesures clés qui s’imposent. »

Réformer le système financier

Hanan Morsy, qui est également économiste en chef de la CEA, cite la Sustainable Debt Coalition (Coalition pour une dette durable), défendue par l’Égypte, pour stimuler une croissance durable et intelligente sur le plan climatique grâce à des outils de financement novateurs. Il s’agit là de l’un des moyens pertinents que le continent peut utiliser pour obtenir des financements verts.

« Les pays doivent examiner les nouvelles choses qu’ils pourraient faire pour permettre l’action, telles que l’augmentation de la mobilisation des ressources nationales, l’amélioration de l’intégrité des marchés du carbone, et le développement des chaînes de valeur d’une manière plus durable pour bénéficier d’une variété de questions que nous traitons », juge Hanan Morsy.

En ce qui concerne le groupe de travail dirigé par la CEA, elle précise : « Nous avons plusieurs tâches qui ont été articulées à travers une déclaration ministérielle en termes de priorités et qui sont dérivées de ce que le continent traverse, y compris la série de chocs mondiaux et l’augmentation des pressions socio-économiques et de l’inflation élevée. »

Selon l’économiste, la période 2023-2024 représente un moment critique pour le monde, qui doit accélérer les efforts de réforme préconisés par le continent et s’aligner sur les propositions du secrétaire général des Nations unies, António Guterres, concernant la restructuration de l’architecture financière internationale.

« La question clé pour l’Afrique est le coût du ré-emprunt. Lorsque les taux d’intérêt étaient historiquement bas à la suite de l’atténuation de la crise financière mondiale, les pays africains en ont bénéficié, mais ils ont tout de même payé des taux nettement plus élevés que d’autres pays présentant des conditions économiques similaires. »

Bien sûr, cette surcote « a un impact négatif sur les pays africains. Actuellement, ceux-ci consacrent en moyenne 22 % de leurs recettes au service de leur dette, ce qui signifie qu’ils détournent des ressources des secteurs sociaux, de la santé et de l’éducation au profit du service de la dette. Nous devons nous assurer que le coût d’emprunt du financement est abordable », affirme-t-elle.

Toutefois, Hanan Morsy reconnaît les progrès accomplis dans la réforme du système financier mondial, tels que la création du fonds fiduciaire pour la résilience et la viabilité.

Elle note que les discussions se poursuivent sur le soutien aux pays confrontés au surendettement, ainsi que sur l’attraction de mécanismes de financement verts et bleus abordables, mixtes et innovants pour soutenir les objectifs climatiques de l’Afrique.

Reconnaissant que les réformes envisagées sont difficiles, Hanan Morsy appelle à une plus grande inclusion accompagnée d’actions.

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