« Ownership / Appropriation : Le renouveau de la matrice de partenariat entre les acteurs économiques et les pouvoirs publics ». Tel est le thème de la 22ème Session des Assises économiques du Mouvement des Entreprises du Sénégal (MEDS), organisée le jeudi 14 septembre 2023. L’ancien Premier ministre Mahammad Boun Abdallah Dione, qui a suggéré la thématique au MEDS et le ministre d’Etat Cheikh Kanté, qui représentait le Gouvernement, ont partagé sur leurs regards sur la notion d’ownership ou d’appropriation pour une meilleure exploitation des ressources naturelles du Sénégal.
Mahammad Boun Abdallah Dione a indiqué que la thématique de ces Assises économiques est plus que d’actualité, à l’heure du Sénégal pétrolier et gazier.
L’ancien Premier ministre a ensuite mis l’accent sur l’importance du contenu local, en vue d’asseoir la souveraineté du secteur privé. Ayant suggéré le thème de l’ownership (l’appropriation) au MEDS, il a évoqué la relation entre le capital et le patrimoine.
D’après son analyse, les multinationales, qui apportent certes les moyens de production, ne devraient pas être les seuls acteurs qui trouvent leurs comptes dans l’exploitation des ressources naturelles au détriment du pays qui détient le patrimoine (titre de propriété).
C’est pourquoi, il mise sur une appropriation du tissu productif par l’entreprise locale, en vue d’augmenter la part de valeur ajoutée qui reste dans le pays.
Si l’on ne détient pas le capital, les bénéfices vont aller ailleurs. Pour corroborer ses propos, l’ancien Premier ministre a souligné qu’il y a des entreprises qui transfèrent 300 milliards de FCFA à l’étranger par an.
Exemple de l’Irlande et de la Norvège
Pour renverser la tendance, il prône l’ownership, l’appropriation des ressources du pays. Dans la foulée, l’expert a cité l’exemple de l’Irlande qui a préféré miser sur le Revenu National Brut (RNB) en lieu et place du Produit Intérieur Brut (PIB).
Les multinationales constituent, certes, des catalyseurs de croissance. Mais, a-t-il insisté, l’Afrique doit se doter de stratégies gagnantes ; ce qui passe par l’ownership du tissu industriel et productif.
La propriété du capital est importante pour une meilleure exploitation des ressources naturelles, a-t-il ajouté. Dans la foulée, Mahammad Boun Abdallah Dione a également cité l’exemple de la Norvège, qui est très riche en ressources naturelles. Selon lui, ce pays nordique a mis en place un système lui permettant d’exploiter, à bon escient, ses propres ressources au lieu d’en confier la valorisation à d’autres acteurs économiques.
Si l’Afrique ne renverse pas la tendance, elle aura des pays riches, mais peuplés de pauvres comme en Amérique Latine, a-t-il averti.
Pour un développement endogène
Pour sa part, le ministre d’Etat Cheikh Kanté, qui représentait le président de la République et le Premier ministre, a déclaré que les méthodes mises en place par les Etats semblent inadaptées. C’est pourquoi, il faut réfléchir sans cesse pour trouver la meilleure voie pour un développement endogène.
L’expert a fait état de limites dans les modes d’exploitation de nos ressources. L’Afrique est considérée comme un « garde-manger », car ce sont les autres qui se taillent la part du lion dans l’exploitation de ses ressources naturelles, au détriment des entreprises et populations locales.
Cependant, le ministre d’Etat a reconnu que l’Afrique est confrontée à des contraintes liées notamment à l’accès et au coût du capital.
Pour étayer ses propos, Cheikh Kanté a déclaré qu’une entreprise sénégalaise qui emprunte de l’argent à un taux de 15 % pourra difficilement mener la concurrence à une société européenne qui emprunte à un taux négatif.
Il faut donc renverser la tendance. Pour y parvenir, il recommande de miser sur un certain nombre de leviers. Ainsi, Cheikh Kanté s’est dit partisan du développement endogène pour la création de richesses (par opposition au développement exogène). Il est également partisan de l’économie sociale et solidaire (qui prône la lutte contre les inégalités) et de la RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises). L’entreprise est, selon lui, le socle qui doit créer la stabilité d’un pays.