Une série de réformes et d’investissements dans les infrastructures essentielles ont transformé le Togo en l’une des destinations d’investissement les plus attrayantes sur le littoral du golfe de Guinée.
L’économie togolaise a connu une croissance moyenne de 5,2 % entre 2012 et 2021, malgré l’impact de la pandémie de Covid à la fin de cette période. Doté de l’un des plus grands ports du continent, le Togo paraît bien placé pour développer des industries plus orientées vers l’exportation. Des efforts sont nécessaires pour lier l’ensemble du pays aux facilités logistiques offertes, mais il est injuste que le Togo soit souvent négligé dans les discussions sur les économies africaines à la croissance la plus rapide, alors que la Côte d’Ivoire, l’Éthiopie et le Rwanda attirent le plus l’attention.
“En avril, le gouvernement a annoncé des plans pour la construction d’un nouveau réservoir sur la rivière Kara, près de la ville de Kara dans le nord du Togo et à proximité de la frontière avec le Bénin”
Le Togo occupe une position stratégique dans le golfe de Guinée, l’une des voies navigables les plus fréquentées d’Afrique de l’Ouest. Malgré la taille relativement petite du pays, la capitale Lomé constitue une porte d’entrée importante vers le vaste arrière-pays de l’Afrique de l’Ouest et vers le marché potentiel de la Cedeao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), qui compte 350 millions d’habitants.
La ZLECAf (Zone de libre-échange continental africain), qui offrira un accès sans entrave au plus grand marché commun du monde, renforcera l’importance du Togo en tant que point d’entrée en Afrique de l’Ouest pour les investisseurs locaux et étrangers.
Avec un produit intérieur brut estimé à 22,7 milliards de dollars, le Togo devrait enregistrer une croissance de 6,3 % en 2023 et de 6,6 % en 2024. Ce, grâce notamment aux projets d’infrastructures et aux réformes structurelles contenus dans la feuille de route 2020-2025 du gouvernement. Publiée en 2020, celle-ci vise à attirer davantage d’investissements et à stimuler la production dans l’agriculture, l’exploitation minière, la logistique et d’autres secteurs clés de l’économie.
Le gouvernement s’est fixé pour objectif d’atteindre une croissance économique annuelle de 7,5 % d’ici à 2025, mais il est essentiel que cette croissance soit répartie plus uniformément dans le pays que par le passé. Les investissements se sont traditionnellement concentrés dans la capitale, Lomé, au détriment des zones rurales.
Le Togo est confronté aux mêmes pressions inflationnistes et aux mêmes problèmes d’endettement que la plupart des pays du monde, mais les menaces sont moins graves que dans de nombreuses autres économies. L’inflation a atteint en moyenne 7,6 % en 2022, principalement en raison d’une forte augmentation du coût des importations de pétrole, qui est passé de 162,8 milliards de F.CFA (248 millions d’euros) en 2021 à 259,2 milliards de F.CFA (395 millions d’euros) en 2022, ainsi que de la hausse des coûts de fret et d’assurance. Le déficit commercial s’est donc creusé de 24 % pour atteindre 514 milliards de F.CFA (784 millions d’euros) en 2022, mais il devrait se réduire si l’inflation diminue comme prévu.
Les dépenses du gouvernement pour faire face à la crise de la Covid-19 et protéger l’économie pendant la pandémie ont fait grimper la dette de 51,95 % du PIB en décembre 2020 à 65,84 % en 2022. Cependant, la dette souveraine reste en dessous du plafond de 70% imposé par l’Uemoa (Union économique et monétaire ouest-africaine).
En juin 2023, la Banque mondiale a formulé un certain nombre de recommandations visant à stimuler les investissements dans certains secteurs clés. Le rapport a mis en évidence le potentiel inexploité de la production agricole et de la compétitivité commerciale.
Comme dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, les matières premières continuent de dominer les exportations, de sorte que « le développement des industries locales permettra d’intensifier la transformation domestique des matières premières et la promotion des chaînes de valeur agricoles », a déclaré Hawa Wagué, alors représentante résidente de la Banque mondiale pour le Togo : « Cela contribuera à la création d’emplois de qualité pour une croissance économique forte et inclusive. »
Amélioration rapide des affaires
La vision de la feuille de route 2020-2025 va au-delà de l’efficacité économique et envisage le Togo comme un État pacifique, moderne et inclusif, engagé dans une courbe de développement ascendante et durable.
Elle vise à renforcer les structures et les institutions de l’État, à favoriser l’inclusion et l’harmonie sociales et à tirer parti des ressources naturelles et des avantages géographiques stratégiques du pays pour créer des emplois pour sa population, en grande partie jeune et instruite.
Les secteurs sur lesquels le gouvernement compte pour concrétiser sa vision sont l’agriculture, le logement, le tourisme, la logistique, le commerce, l’énergie et l’externalisation des processus d’entreprise. Les télécommunications, l’industrie manufacturière, les services de santé et les activités portuaires sont d’autres composantes du mix.
Le gouvernement estime que la situation stratégique du Togo en fait un candidat idéal pour devenir le principal centre logistique de la région.
Il s’agit là d’un élément central de la stratégie de l’État visant à développer l’économie et à attirer davantage d’investissements.
Lomé, le seul port naturel en eau profonde de la sous-région, est au cœur du développement du secteur logistique.
Dans le cadre de l’actuel plan national de développement, le gouvernement a introduit de vastes réformes en matière de propriété foncière, de fiscalité et de droit du travail, tandis que la déréglementation des secteurs de l’énergie et des télécommunications a été mise en œuvre.
Ces changements semblent déjà porter leurs fruits.
Le ministère de l’investissement a également lancé la plateforme d’investissement électronique Invest in Togo pour faciliter et simplifier les procédures d’investissement.
Les nouveaux investissements dans l’économie togolaise sont à la fois une reconnaissance des efforts du gouvernement et un encouragement à ses plans de modernisation de l’économie et du pays.
Il s’agit notamment d’une centrale thermique de 129 millions d’euros en partenariat avec le groupe Eranove, d’un centre de données de 25,2 millions d’euros financé par la Banque mondiale, d’un parc à conteneurs de 200 millions d’euros en partenariat avec Arise Integrated Industrial Platform et d’une centrale photovoltaïque de 31,92 millions d’euros financée par la BOAD (Banque ouest-africaine de développement) et le Fonds d’Abu Dhabi pour le développement.
Confiance des institutions financières
Le Togo a également gagné la confiance des institutions financières multilatérales, qui ont réagi en augmentant leur soutien au pays. Depuis 2007, la Banque africaine de développement a financé 33 projets à hauteur de 300 millions d’euros.
Pour étendre le développement économique à d’autres régions du pays et encourager une plus grande variété d’exportations, il est essentiel d’investir dans les transports routiers et peut-être aussi ferroviaires afin d’améliorer les connexions avec le port de Lomé. Le port a le potentiel d’augmenter les volumes d’exportation, mais les activités de transbordement dominent actuellement le chiffre d’affaires des marchandises, car les exportateurs potentiels ne disposent pas de l’infrastructure physique nécessaire pour utiliser l’entrepôt.
Lomé traite déjà des marchandises pour les régions enclavées au nord du Togo, en particulier le Burkina Faso, mais les liaisons de transport avec son voisin du nord gagneraient également à être améliorées. Des progrès ont déjà été réalisés grâce au nouveau dépôt intérieur de conteneurs (DIC) de PIA Togo, qui a ouvert ses portes en août 2021 à proximité de Lomé.
Le projet s’étend sur 20 hectares, y compris des zones de développement industriel et de production textile, et peut accueillir 150 000 EVP (équivalents vingt pieds) par an. Cette capacité pourrait être portée à 550 000 EVP/an d’ici 2030. Le projet est conçu pour libérer la capacité du port de Lomé en permettant aux conteneurs d’être dédouanés avant d’arriver au port. PIA Togo est un partenariat public-privé entre le gouvernement du Togo et Arise Integrated Industrial Platforms. En outre, une nouvelle loi sur les transports, élaborée en collaboration avec l’Union internationale des transports routiers et la Banque mondiale, a été adoptée par le parlement togolais en février 2023 ; elle vise à faire du pays une plaque tournante de la logistique.
Un centre bancaire
Outre le secteur portuaire et logistique, l’autre grand atout du Togo en termes de connexions économiques internationales est son secteur des services financiers. Le secteur bancaire togolais est surtout connu pour la banque panafricaine la plus en vue, Ecobank International, qui est basée au Togo mais qui fournit des services bancaires de gros, de détail et d’investissement dans 36 pays africains. Le pays abrite également 14 autres banques commerciales et la BOAD.
Avec un régime d’investissement suffisamment attractif, le Togo pourrait devenir un centre de banque numérique, et une partie de l’infrastructure de soutien est déjà en train d’être mise en place. Par exemple, un centre de données de 25 millions d’euros a été achevé en juin 2021 grâce à un financement de la Banque mondiale pour héberger des bases de données publiques et privées et des services en nuage afin de promouvoir la souveraineté numérique.
Eau et agriculture
L’autre grand projet d’investissement concerne les secteurs de l’eau et de l’agriculture. En avril, le gouvernement a annoncé des plans pour la construction d’un nouveau réservoir sur la rivière Kara, près de la ville de Kara dans le nord du Togo et à proximité de la frontière avec le Bénin. Le projet sera développé par la société nigériane Hitech Construction, avec un coût d’investissement total estimé à 119 millions d’euros. Le projet fournira de l’eau à 500 000 personnes ainsi que de l’eau d’irrigation pour augmenter les rendements agricoles, tandis qu’une centrale hydroélectrique d’une capacité de production de 24,2 MW sera construite sur le barrage.
Le secteur agricole bénéficiera également du financement de 250 millions de dollars que la Société internationale islamique de financement du commerce (ITFC) a accepté de fournir au Togo en mai. L’argent sera consacré à trois domaines : l’énergie, l’agriculture et le secteur privé en général.
L’ITFC espère que l’investissement augmentera le potentiel global d’exportation du pays. Elle a également signé un accord pour un programme triennal de renforcement des capacités portant sur la facilitation du commerce, la finance électronique, la promotion des chaînes de valeur à l’exportation et la finance islamique.
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