Sénégal, un train de réformes encore trop lent

Le FMI s’attend à une accélération de la croissance économique en 2023 au Sénégal, après une année 2022 moins performante qu’espéré. L’institution considère que les réformes économiques doivent s’accélérer et que le pays doit repenser certains filets sociaux qui n’atteignent pas leurs objectifs.  

Une mission du FMI (Fonds monétaire international), dirigée par Edward Gemayel, a émis quelques réserves quant au rythme de réformes structurelles menées au Sénégal. Toutefois, la mission note les progrès d’ensemble enregistrés par le pays, tandis que le FMI prolonge ses accords de crédits avec le Sénégal, dans l’attente d’un nouveau programme qui devrait être conclu prochainement.

« Les discussions se poursuivront dans les prochains jours en vue de parvenir à un accord, qui sera soumis à l’approbation de la direction générale du FMI et à l’examen du Conseil d’administration du FMI prévu à la mi-décembre », explique Edward Gemayel.

« Il est important que le gouvernement améliore le ciblage des subventions, commence à les réduire à partir de 2023 et accélère la finalisation d’une feuille de route afin de les supprimer progressivement d’ici à 2025. »

Sur le plan économique, le Sénégal n’échappe pas à la morosité ambiante : « La faiblesse de la demande extérieure, la hausse des prix des denrées alimentaires et de l’énergie, et l’appréciation du dollar ont eu un impact négatif. »

Déjà, le FMI avait ajusté en baisse sa prévision de croissance pour 2022, attendue désormais à 4,7%. L’inflation, qui a atteint son plus haut niveau depuis plusieurs décennies, a été revue à la hausse à 8,5 %. « Les pressions inflationnistes, liées en grande partie à la flambée des prix des denrées alimentaires, s’avèrent plus larges et plus persistantes que prévu, entraînant de graves difficultés pour les ménages, notamment les plus vulnérables », souligne le FMI.

Qui s’attend toutefois à un rebond en 2023 (+8,3%), à la faveur « du début de la production de pétrole et de gaz et en l’absence d’une nouvelle escalade de la guerre en Ukraine ». De son côté, l’inflation devrait reculer sous l’effet d’une bonne récolte attendue et de la baisse des prix internationaux des produits de base.

Les programmes d’appui du FMI sont conditionnés à une feuille de route en matière de réformes structurelles. « La performance au titre du programme a été globalement satisfaisante », juge d’emblée Edward Gemayel, « à l’exception du plafond de contrats de marchés publics conclus sans mise en concurrence ».

Assainissement budgétaire

Tous les objectifs quantitatifs de fin juin ont été atteints. Des progrès significatifs ont été enregistrés dans la mise en œuvre de l’agenda des réformes structurelles, « mais le rythme a été plus lent que celui prévu par le programme ».

En particulier, note le FMI, le cadre opérationnel de gestion budgétaire des recettes issues de l’exploitation du pétrole et du gaz et le nouveau Code des marchés publics, qui devrait garantir des appels d’offres plus ouverts et plus compétitifs, doivent encore être adoptés.

De plus, le Fonds note des retards dans le paiement des transferts monétaires pour les ménages les plus pauvres ; « ils devraient être résorbés urgemment ». Conseil d’ami : « Les autorités devraient opter pour une solution digitale plus efficace pour le paiement de ces transferts. » D’autre part, il est « essentiel », juge le FMI, de mettre en œuvre les actions restantes en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme pour sortir le Sénégal de de la surveillance renforcée du Groupe d’action financière, le GAFI.

« Compte tenu des marges de manœuvre budgétaires limitées, des efforts graduels d’assainissement budgétaire sont nécessaires à moyen terme pour préserver la viabilité de la dette. » Ces efforts devraient débuter en 2023 par une plus grande mobilisation de recettes fiscales en s’appuyant sur la bonne performance de cette année et une utilisation limitée des réserves budgétaires, ce qui permettrait au gouvernement de contenir le déficit budgétaire autour de 5% du PIB.

 

Edward Gemayel, chef de la mission du FMI, et le Premier ministre du Sénégal, Amadou Ba.
Edward Gemayel, chef de la mission du FMI, et le Premier ministre du Sénégal, Amadou Ba.

Le FMI regrette que les subventions à l’énergie ne soient pas davantage ciblées, et qu’en conséquence, « elles profitent davantage aux couches les plus aisées de la population ou gros consommateurs ». Ces subventions deviennent de plus en plus coûteuses ; elles devraient atteindre 750 milliards de F.CFA en 2022 (1,43 milliard d’euros, soit 4,4 % du PIB). En l’absence de nouvelles mesures, elles s’élèveraient à 800 milliards de F.CFA en 2023. « En conséquence, il est important que le gouvernement améliore le ciblage, commence à les réduire à partir de 2023 et accélère la finalisation d’une feuille de route afin de les supprimer progressivement d’ici à 2025. »

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