Dans la discrétion, les actifs financiers digitaux gagnent en importance dans le monde. Certains analystes attribuent cette percée à la spéculation, mais d’autres invitent à plus de réalisme, et indiquent que le Bitcoin et les valeurs assimilables sont là pour durer.
A fin août 2021, la valeur de l’ensemble des cryptomonnaies présentes sur le marché a atteint le niveau historique de 2000 milliards € (2312 milliards $), apprend-on du rapport sur les actifs financiers dans le monde, publié par l’assureur allemand Allianz, qui cite la plateforme Coindesk. Ce chiffre reste confirmé et est même légèrement en hausse à 2435 milliards $, selon des calculs de l’Agence Ecofin sur la base des données fournies par CoinmarketCap.
Une comparaison avec les valeurs en août 2020 (270 milliards $) et la même période en 2019 (20 milliards $), selon Coindesk, permet de comprendre la progression que ce type d’actifs financiers a gagné auprès des investisseurs, même si cela ne représente qu’un peu plus de 1% de la valeur globale des actifs financiers dans le monde, tel qu’elle a été comptabilisée par Allianz.
Mais à la différence du boom de 2017, les cryptomonnaies en 2020 n’intéressaient plus seulement les investisseurs individuels. Elles ont commencé aussi à attirer des professionnels de l’investissement. « Avec cette nouvelle augmentation de la demande, les grandes institutions financières qui offrent des services connexes ont commencé à étendre leurs infrastructures pour s’adapter à ce style d’investissements », explique Allianz dans son rapport.
Mais l’assureur prévient aussi qu’il y a encore du chemin à parcourir pour les cryptomonnaies, pour arriver au top des actifs financiers les plus courus dans le monde. L’assureur allemand explique qu’en tant qu’actifs de réserve de valeurs et des échanges, ces instruments peinent encore à atteindre le même niveau de vélocité que la monnaie classique. Pour un billet de banque ou une pièce de monnaie émis, les utilisateurs peuvent changer de mains entre « 10 et 55 fois » ; ce qui permet de créer de la richesse. Dans le cas du Bitcoin qui la cryptomonnaie la plus valorisée actuellement, on assiste à seulement 0,17 échange.
Cette analyse a pour but de démontrer que la valeur des monnaies dites “B” pour désigner le Bitcoin et tous les actifs semblables repose encore sur la spéculation, et que la volatilité qui les caractérisent ne devrait pas leur permettre de continuer de progresser. Cette vision des choses est soutenue par le fait que mis hormis le Bitcoin et l’Etherum qui tirent la valeur de ces actifs vers le haut (60% de la valorisation globale), très peu de ces actifs sont encore « explorables », donc ont la capacité de progresser en volume.
Cette façon de voir n’est pourtant pas acquise chez tous les leaders d’opinion qui s’intéressent à la question. Dans une publication faite par le National Bureau of Economic Reserach, des économistes reconnus comme étant éminents, à l’instar de Carmen Reinhart, ancienne économiste en chef de la Banque Mondiale, suggèrent qu’il faudrait adopter une attitude plus dynamique.
Leur argumentaire tend à remettre en question l’opinion dominante selon laquelle, les cryptomonnaies sont peu utilisées à des fins de transactions autres que l’achat d’autres monnaies virtuelles, et que sa valeur est presque entièrement basée sur la spéculation. Le document révèle par exemple que des transactions en monnaies digitales valorisées en ringgit malaisien ont aussi été observées. Mais au-delà de tout, ce document tend à rappeler que les cryptomonnaies sont là pour durer, et il faudrait en tenir compte dans les perspectives.
L’Agence Ecofin a pu comptabiliser plus de 2800 cryptomonnaies annoncées dans le monde, dont 1079 sont négociées sur des plateformes de marché virtuelles et 998 qui ont une valorisation connue. Le Bitcoin continue d’être le plus valorisé (1045 milliards $ au 8 octobre 2021). Vient ensuite l’Etherum (425,2 milliards $). Mais sur un plan unitaire, c’est un dérivé du Bitcoin (Wrapped Bitcoin) qui se positionnait en tête avec une valeur de 54 840 $ par unité de valeur.
Ces différentes évolutions rappellent qu’en Afrique où on est en quête d’un instrument d’échanges pour fédérer le commerce intrarégional autour d’une même réserve de valeur, des opportunités se présentent. On voit pourtant les politiques adopter une attitude conservatrice face à ces monnaies digitales. La Banque centrale au Nigeria a durci les possibilités de transactions sur ces actifs. On comprend que le succès de ces actifs contrecarrait son propre projet de monnaie digitale centralisée.
En zone CEMAC et particulièrement au Cameroun, la BEAC s’est montrée particulièrement sévère avec les traders de Bitcoin. Il y avait un contexte de filouterie, mais avec le gouvernement, ils ont rejeté une opportunité de création de valeurs. Mais il faudrait pour cela surmonter des défis.
(Agence Ecofin)